Portrait de Légendes — Entre Kinshasa et Vienne, malgré la grande distance et une opposition des cultures, malgré les époques et les réalités, deux âmes sœurs vont tout défier et partir à la conquête des arts plastiques congolais. Lui est devenu maître, appelé affectueusement « Professeur Liyolo », alors qu’elle, loin d’être restée dans l’ombre, a sculpté une carrière d’icône.
Coup de foudre à Graz
Mai 1964. C’est la Pentecôte à Graz, la capitale de la province sud-autrichienne de Styrie. À cette époque, pendant que l’Afrique vibre sous ses mouvements indépendantistes et les naissances difficiles de ses États, alors que l’Amérique est secouée par les luttes des Afro-Américains pour leurs droits civiques, cette ville européenne voit quinze jeunes étudiants « nègres » débarquer. Ils viennent du Congo, détenteurs de bourses d’études. Parmi eux, un brillant jeune homme, du nom de Liyolo Limbe Mpuanga Alfred. Il a à peine 21 ans qu’il y débarque avec un diplôme en sculpture de l’Institut Saint-Joseph de Léopoldville (qui deviendra plus tard l’Académie des Beaux-Arts de Kinshasa), obtenu depuis 1958. Il est inscrit à l’Institut des Arts Appliqués de Graz.
En Autriche, les années 1960 ne sont pas faciles à vivre pour des Congolais dépaysés, eux qui viennent, pour la première fois, de quitter leur pays colonisé. Dans ce pays où la colonisation n’existe pas, les habitants et les organisations catholiques vont devoir veiller au grain pour l’intégration de ces étudiants déboussolés, qui parlent tout juste français, dans une contrée qui parle allemand. Friederike Gessl est très jeune quand elle entame ses études de pédagogie spécialisée dans l’éducation des enfants mentalement handicapés. Cette année-là, en 1964, elle a seize ans lorsqu’elle va voir, elle et ses camarades de promotion, les responsables de son institut pour proposer leur aide aux nouveaux étudiants congolais.
papa, ils refusaient.
Dans l’innocence la plus totale, assez naïvement, elle fait alors la connaissance d’Alfred Liyolo, avec qui elle se lie aussitôt d’amitié. Débute une complicité qui durera toute une vie. Amie, confidente à qui Liyolo, loin d’être le grand maître qu’il deviendra, vient parfois présenter une future copine ou prétendante. « J’étais très jeune quand j’ai rencontré mon mari. Je n’avais aucune idée derrière la tête. Moi, c’était plus de la curiosité et de la compassion. J’étais concentrée sur mes études et c’était ma seule priorité. Je les prenais au sérieux. Jamais je n’aurais imaginé l’épouser », confie Friederike Gessl, qui deviendra Mme Liyolo quatre ans plus tard.
Alfred Liyolo est trop brillant. L’École des Arts Appliqués de Graz, qui lui a demandé de sculpter son propre portrait comme test d’admission, va finir par s’en rendre compte. Ses supérieurs sont sans équivoque: « Ce jeune homme n’a plus rien à apprendre ici ». Liyolo est envoyé à la fameuse Académie des beaux-arts de Vienne, dans la classe des maîtres sculpteurs où il est sous la direction du célèbre maître Wander Bertoni. Il décroche son diplôme de maîtrise en sculpture et un grand prix de cette académie en 1969. Un an avant, sa vie bascule à jamais. Friederike Gessl, jadis amie et confidente, va conquérir sa difficile âme d’artiste. Ils convolent en justes noces et imposent à l’Autriche l’expérience des couples mixtes.
Les débuts du jeune couple sont compliqués. Ils ont du mal à se trouver ne serait-ce qu’un logement. Ils font même la une d’un journal local. « À cette époque, l’Autriche n’était pas vraiment habituée à voir des couples mixtes. Un noir et une blanche mariés… ça ne passait pas. Quand ils cherchaient un appartement, les bailleurs acceptaient quand maman se pointait seule. Puis, quand elle revenait avec papa, ils refusaient. C’était tellement compliqué que papa était le seul étudiant autorisé à vivre avec son épouse sur le campus », explique Myoto Liyolo, fille cadette du couple.
La vie de Friederike et Alfred va basculer en cette année 1969. Si le futur maître Liyolo a l’avenir bien tracé du côté de l’Académie des beaux-arts de Vienne, de laquelle il reçoit de laquelle il reçoit une offre de poste d’enseignant, en plus d’être le seul noir à être ainsi élevé, il voit poindre un dilemme qui fait vibrer son cœur, au point de tout chambouler. L’histoire se déroule en Allemagne, dans la ville bavaroise de Tegernsee. Le Président Mobutu, en tournée, va à la rencontre des étudiants congolais. Présent à l’événement, Liyolo Alfred découvre, pour la première fois, un président à cheval entre le nationalisme et l’amour du beau. Au milieu des spécialistes en agriculture ou encore en médecine, le Président s’intéresse aux « Bikeko » de Liyolo qui l’impressionnent, au point de supplier l’artiste de regagner son Congo natal, où une révolution se prépare et qui aura grandement besoin de lui.
Mais Liyolo n’est plus seul au monde. Friederike, son épouse, attend déjà un enfant. Le couple est aussitôt face à la croisée des chemins. Rester en Autriche où une carrière brillante attend son mari Liyolo ou partir vers l’inconnu du Congo ? D’autant plus que la jeune Autrichienne avait également un parcours à elle. Formée en pédagogie appliquée selon le modèle de l’enseignement public autrichien de l’époque, elle se devait de servir l’État dès la fin de ses études. Tout voyage vers le Congo se heurte alors à un veto des autorités de sa province de Styrie. L’affaire fera même la une des journaux en Autriche.
« C’était un scandale pour Vienne. Orpheline de père dès l’âge de onze ans, j’avais droit à une bourse pour toutes mes études supérieures. Mais cela voulait dire qu’une fois les études terminées, je devais servir l’État et les institutions de mon pays. Et pire encore, je venais d’épouser un nègre et je voulais en plus quitter le pays », confie-t-elle. « Il a fallu que le maire de notre ville, Graz, intervienne auprès de l’État pour que je puisse quitter le pays. Car, si j’étais libre de l’épouser, je ne pouvais pas par contre quitter le pays », ajoute-t-elle.
De Vienne à la galère de Bandalungwa
L’État autrichien et ses complications ne sont pas les seuls à se dresser face à Friederike. Son propre mari souhaite que sa femme reste encore à Graz, le temps de préparer son arrivée au Congo. Un pays à peine indépendant, où des « indigènes » n’épousent pas trop les « blanches » et où beaucoup d’entre eux n’avaient pas de maison. C’est en tout cas la situation de Liyolo. Même s’il a été convié par le Président Mobutu en personne pour regagner le Congo, c’est surtout son grand patriotisme qui le pousse à rejoindre ses terres natales, sans vraiment en avoir les moyens. Mais Alfred sous-estimait sans doute la ténacité de son épouse. Friederike laissera à peine une semaine à son mari avant de fouler, elle aussi, le sol de Kinshasa.
En décembre 1969, enceinte jusqu’au cou, du haut de ses 21 ans, la jeune Autrichienne quitte pour la première fois sa tanière de Frohnleiten (Graz-Umgebung en Styrie), pour arriver à Kinshasa, dont on ne saura plus jamais lequel des deux aura conquis l’autre. À Kinshasa, les débuts ne sont pas faciles pour le couple. Sans maison, sans repères, loin de Vienne et son confort, Friederike atterrit au domicile de sa belle-famille dans l’actuelle Bandalungwa, rue Shilowango, dans une annexe de cour commune. « Entre Vienne et le Congo, le choc était total. J’ai dû partager le lit avec un cousin de mon mari. Mon mari dormait au milieu, le cousin d’un côté et moi de l’autre côté. Ça a duré une semaine et je crois que le choc était encore beaucoup plus grand pour mon mari. Mais on n’avait pas le choix. Il n’avait pas de sous », explique Mme Liyolo, très émue.
Liyolo est nommé assistant à l’Institut supérieur des arts plastiques, l’Académie des beaux-arts. Mais le salaire ne suit pas. Dans ces années 1970, la disparité existe déjà entre les employés expatriés et les nationaux. En déménageant, les Liyolo ont du mal à payer leur loyer. Aux côtés de son mari, Friederike entre en scène et va jouer son véritable rôle de catalyseur. Autour de son époux, l’ancienne pédagogue tente d’exercer à Kinshasa, avant de finir par ranger sa passion derrière le futur maître. Utilisant ses contacts, Friederike organise le métier de son mari. Des rencontres lors d’expositions, elle garde toutes les cartes de visite et les questionne.
Gloire et triomphe
La femme est le thème central de sa création libre. Avec une prédilection pour les surfaces lumineuses, la rigueur du dessin trace des formes lisses et élancées. Le réalisme naturaliste ou stylisé laisse parfois place à l’abstraction biomorphique. « La Penseuse », une merveille, fige une belle femme qui s’affale sur un tabouret, soutenue par sa propre main gauche en appui, l’air pensif. D’une beauté de nymphe et dans une grâce des dieux, aussi érotique que fine, avec sa silhouette filiforme, elle incarne certainement l’idée que Liyolo se faisait du Féminin, inspiré sans doute par sa moitié, son épouse qui le suit alors comme une ombre. Œuvre majeure de sa collection, « La Penseuse » émerveillera Léopold Sédar Senghor en personne.
Dès les années 1974, les Liyolo trônent sur l’art congolais. Ils sont partout au Congo et exposent dans le monde entier. Le Festival international de la jeunesse à Berlin en 1973, la Foire internationale de Lausanne la même année, le Comptoir suisse de Lausanne en 1974, le Festival de Bâle en 1978, la Foire de Berne en 1982, l’Exposition des avant-gardistes zaïrois à Paris en 1975 et 1978, au Louvre en 1982, l’Exposition de Bruxelles en 1978, celle de la Banque Belgolaise à Bruxelles en 1979 et 1983, le symposium « Marbre et son » à Arandjelovac en 1976, Le deuxième Festival mondial des arts négro-africains de Lagos en 1977, l’Exhibition of Contemporary African Modern Arts à Washington en 1977, Los Angeles en 1979. Partout, le duo vit et triomphe. Jusqu’à atterrir dans le palais impérial de Tokyo.
En 1989, grâce à ses contacts à l’ambassade du Japon au Zaïre, Friederike s’offre une invitation pour une exposition organisée par la Fondation du Japon à Tokyo. Sur place, la fougueuse dame, qui avait émis le vœu de rencontrer l’Empereur Akihito et l’Impératrice Michiko, voit sa surprenante demande exaucée. « Nous avons été reçus par l’Empereur et l’Impératrice. La cérémonie du thé qui dure normalement 15 minutes a duré 45 minutes avec nous. Chaque fois que le protocole d’État venait discrètement notifier à l’Empereur qu’il était temps, il leur faisait signe de la main pour qu’ils attendent. C’était magnifique, l’Impératrice m’a montrée sa collection privée de Haniba, des petites céramiques qui avaient quatre ou cinq mille ans, qu’elle gardait secrètement dans le palais », raconte Mme Liyolo.
Jamais un artiste du Congo n’aura eu un tel privilège. La rencontre, à l’aube de cette nouvelle décennie au Zaïre, consacre les Liyolo plus que jamais sur le toit de l’art congolais. Mais la vie de ce couple est indélébilement attachée à celle de leur pays. De retour à Kinshasa, la politique les rattrape. La nuit du 23 septembre 1991, les militaires, non payés, suivis de civils, se mettent à piller les magasins et les dépôts industriels. Dans la journée, la colline de Mont-Ngafula en est le théâtre. Les populations locales démunies s’en prennent aux demeures supposées aisées. Le sanctuaire des Liyolo, centre culturel et véritable lieu de pèlerinage, passage obligé des visiteurs de marque du Président Mobutu, en est une cible. Si l’armée, qui patrouillait dans les environs, réussit à stopper la meute avant qu’elle n’atteigne la résidence, la deuxième vague de 1993 ne laissera aucune chance aux Liyolo.
« Pendant trois jours, mon mari qui était bloqué à Brazzaville a essayé de joindre les autorités pour les avertir. Mais au moment où il a fini par les avoir, le mal avait déjà été fait. La maison a été vidée complètement. Ils ont pris tout ce qu’ils pouvaient emporter. Nous avons perdu toute notre bibliothèque et toute une collection d’œuvres importantes », raconte Mme Liyolo, très affectée. « C’était d’autant plus difficile qu’en 1991, ils n’avaient pas pu entrer dans la maison. Ils avaient abîmé le jardin et brûlé des pneus aux alentours. Mais cette fois, en 1993, ils avaient tout pris et endommagé », ajoute-t-elle.
La famille vivra dispersée entre Vienne et Londres pendant cinq ans. Alfred Liyolo, raconte son épouse, sera profondément marqué par cet épisode. « Son âme était meurtrie. Il se demandait sans cesse pourquoi on lui avait fait ça. Il a toujours dit : “J’aime la jeunesse de mon pays, j’ai tout fait pour elle, mais je peine à combattre. Pourquoi cette colère ? Pourquoi cette rage envers moi ?” », révèle Mme Liyolo. La douleur d’Alfred Liyolo se sentira dans ses œuvres majeures qui suivront ces épisodes. Plus jamais, explique son épouse, le maître ne sera le même. « J’ai vu dans l’œuvre de mon mari qu’il était fortement touché par ces années-là. Et peut-être plus que moi. Parce que lui, en tant que Congolais, ne comprenait pas. »
Liyolo sculpte « L’Attente », une mère africaine enceinte, portant un autre enfant à peine visible dans le dos, et qui se perd dans le questionnement, en défiant le temps. « Il l’a créée pendant ces années de turbulence. C’est une œuvre qui exprime ses doutes et ses interrogations pendant cette période, une période importante et significative de sa vie », explique son épouse. Le couple va s’en remettre, et même se focaliser sur ce qui pourrait être sa plus grande œuvre : la maison, un sanctuaire, un centre culturel qui s’étend sur six parcelles sur plusieurs centaines de mètres carrés.
Un sanctuaire à Mont-ngafula
Friederike et son mari sont arrivés sur la colline de Mont-Ngafula en 1974. En quête d’espace et de calme, ils choisiront la nature, loin du centre-ville. À l’époque, Kinshasa « s’arrête » à une dizaine de kilomètres, bien avant Mont-Ngafula. Sur cette colline, les Liyolo doivent tout construire, s’installer et également faire développer tout le quartier. De l’électricité à l’eau, en passant par la route, c’est une aventure titanesque qui les attend. « Nous avons dû financer l’installation de la cabine moyenne tension d’électricité grâce à un crédit bancaire payé par nos œuvres d’art », dit-elle. Quant à l’eau, c’est un lobbying auprès de l’ancien Directeur général de la Regideso, Gilbert Tshiongo, qui aidera.
Aujourd’hui, tout un quartier s’est développé autour du sanctuaire des Liyolo, qui n’a plus ni eau ni électricité. Friederike a vécu cinquante ans au Congo. Bien plus d’années que dans son Autriche natale. Loin de n’être qu’une « femme d’artiste », la native de Frohnleiten en est une elle-même. Dans les galeries installées dans une salle du havre des Liyolo, la dame fixe le mur, plein d’œuvres, dont les céramiques qu’elle a réalisées, en repensant à la merveilleuse vie qu’elle a eue aux côtés de son mari. Un mari, dit-elle, qui aura sans cesse été énigmatique et spécial. Mais il a bien fallu que quelqu’un prenne soin de lui. « Je me suis toujours organisée pour lui ôter tous les soucis, tous les problèmes, pour qu’il se consacre entièrement à son art », dit-elle.
« Liyolo n’est pas mort »
Mont-Ngafula, Mme Liyolo fait le tour de son domaine. Deux ans après le décès de son mari, rien n’a changé. « La relève est là » entend-on derrière un mur, où le groupe électrogène fonctionne sans s’arrêter, dont le boucan rivalise avec une meuleuse et d’autres machines. Un jeune homme s’acharne sur un bois. Une table plutôt. Rik, c’est son nom, est une réincarnation d’Alfred. Seule sa peau blanche diffère. Le fils est sur la lignée du père. Il a même copié sa calvitie légendaire. Il tient déjà les ateliers, en bijouterie et inventions. Il travaille aussi sur une machine qui pourrait produire et stocker de l’électricité. « Papa est parti, mais son œuvre doit continuer. Nous sommes là, nous sommes la relève. Il nous a bien préparés pour cela », dit-il.
Comme Friederike, toute la famille de maître Liyolo a vécu autour de son œuvre. Les trois enfants ont sillonné le monde dans les bagages de leurs parents et ils maîtrisent tous les rouages. « Papa a formé Rik à son métier. Mais nous autres, les filles, il nous a toujours tenues loin des ateliers. C’est plutôt de maman que nous avons appris tout le fonctionnement de son œuvre et de son domaine. Nous connaissons certes tous les aspects techniques, quelle machine sert à quoi, comment se fait telle ou telle œuvre, mais papa préférait nous voir être encadrées par maman dans l’organisation plutôt que dans la fabrication », explique Myoto, une des deux filles de Liyolo.
Un choix assez étrange, quand on sait que la femme est le thème central de la création libre de Liyolo. Le même Liyolo est celui qui s’est battu pour arracher des autorités congolaises que les femmes soient admises comme étudiantes à l’Académie des beaux-arts de Kinshasa. Néanmoins, en regardant l’œuvre de l’artiste et sa relation fusionnelle avec son épouse, qui elle-même en est une, on pourra remarquer qu’en réalité, en envoyant ses enfants vers le talent de son épouse, Liyolo n’a eu qu’une haute estime de cette dernière. Et son œuvre même ne pourrait se soustraire de l’influence de Friederike, l’amour de sa vie.
Un Liyolo a tiré sa révérence, d’autres veulent perpétuer le mythe. En commençant par l’épouse qui rêve de transformer ces lieux marqués par l’histoire et l’art, en un musée privé. En quête de ressources financières, Mme Liyolo philosophe en se rappelant l’inoubliable existence vécue aux côtés de son mari. Mais le Congo qu’ils ont dans la peau les lie à jamais à son histoire. « C’était toujours le souhait de mon mari. Il a toujours voulu éduquer les plus jeunes à l’art, faire développer leur don manuel. Ici, nous aurons un musée et des ateliers pour pérenniser ses œuvres. C’est difficile, nous n’avons pas les moyens. Nous n’avons que cet héritage, mais nous allons continuer son œuvre », promet-elle.
Mme Liyolo pleure presque lorsqu’elle évoque la volonté de son mari pour ces lieux. En les visitant, on y découvre un monde merveilleux où œuvres d’art et mère Nature se côtoient dans une symbiose idyllique. Le temps s’arrête et on s’évade dans cette fraîcheur sans fin. La fin d’une extraordinaire rencontre de l’autre Liyolo, une dame, une épouse, une maman, une artiste qui a su s’élever pour en faire briller un autre. L’histoire de ce pays est inéluctablement marquée par les Liyolo, qui n’ont pas fini de la sculpter.
Légende de Congo au Féminin
Le 4 mai 2021, c’est le sanctuaire des Liyolo sur la colline de Mont-Ngafula qui est en ébullition. Il y a deux ans, Alfred Liyolo, grand maître sculpteur congolais, rendait l’âme. Le « Maître » ne disparaît pas pour autant avec son œuvre. Derrière lui, il laisse tout un empire artistique, mais également une dame, tout aussi méconnue que talentueuse, que « Congo au Féminin » déniche. Quand elle arrive enfin au sanctuaire des Liyolo, non sans avoir affronté les embouteillages monstres de Mont-Ngafula, et malgré son cortège officiel, la Première dame Denise Tshisekedi est soulagée de prendre Mme Liyolo dans ses bras.
L’épouse du président congolais a initié « Congo au Féminin » visant à primer et récompenser les femmes qui ont marqué l’histoire de la République démocratique du Congo. Aux côtés de la bienveillante Marie-Antoinette Mobutu, des virtuoses Abeti Masikini et Mpongo Love ou encore des légendes littéraires comme Marie-Eugénie Mpongo et Élisabeth Tol’Ande, se tient désormais et fièrement Friederike. Cette dame n’est pas que l’épouse de Liyolo.
C’est aussi une artiste elle-même. Spécialiste en céramique. C’est également une femme qui porte à elle seule toute une famille et la carrière brillante de son mari. Denise Tshisekedi lui remet un diplôme et un cadeau. Sous le regard attendri de ses enfants et petits-enfants. La native de Frohnleiten, qui a vécu 51 ans au Congo, bien plus d’années que dans son Autriche natale, le prend comme une consécration tant de sa vie que de son engagement artistique au Congo.
Madame Liyolo fait faire le tour du propriétaire à la Première dame, lui présentant l’immense œuvre qu’elle et son mari ont réalisée. Des œuvres, mais aussi, des ateliers et la succession de Liyolo. Une succession qui a la lourde tâche de perpétuer une œuvre quasi parfaite. À Denise Tshisekedi, Rik Liyolo offre un bijou, confectionné par ses soins. Bien plus qu’une visite, l’image de la Première dame aux côtés de cette mère et toute sa famille vouée au Congo et à son art restera l’un des grands moments de l’histoire du Congo au Féminin